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- Infos pratiques
Le mythique chemin de Stevenson, qui traverse le département le moins peuplé de France, enchaîne des paysages à couper le souffle, du Velay jusqu’aux Cévennes profondes et si lumineuses, annonciatrices de la douceur du Sud…
La Bastide-Puylaurent > Le Bleymard
Âne dans un champ © Michel CAVALIER / HEMIS
Le GR® suit le chemin de fer Le Cévenol jusqu’au village-gare de Chasseradès. Doucement, il se hisse entre bois et lande à genêts sur les contreforts de la montagne du Goulet, où le Lot (entre autres) prend discrètement sa source.
Robert-Louis Stevenson et son ânesse Modestine étaient en marche depuis quelques jours déjà quand ils traversèrent La Bastide-Puylaurent. À l’époque, le chemin de fer des Cévennes venait juste d’être mis en service et le village posté dans une boucle de l’Allier comptait le double de sa population actuelle. « L’hiver, on n’est pas gênés par le passage », ironise la tenancière de l’hôtel- restaurant des Genêts, tandis que je mets mon sac à dos. Si, un siècle et demi après l’itinéraire de l’Écossais et de son équidé, le GR® 70 est entré au panthéon des grands sentiers pédestres, le randonneur printanier a peu de risque d’être dérangé par la foule. Tandis qu’au bout de deux virages, le plateau du Chambounet dévoile la vue sur la montagne du Goulet, l’une des raisons de cette solitude me saute aux yeux. « En avril, il peut faire 20 degrés comme neiger à gros flocons ! » m’avait prévenu mon hôtesse. La seconde option semble avoir eu lieu il y a peu. La fraîcheur aidant, le premier relief est vite enjambé et la descente vers Chasseradès égrène son chapelet de hameaux.
Où le Lot trace ses premiers méandres
Au tréfonds du vallon, blotti sur les bords de la rivière Chassezac, Mirandol était une autre de ces paisibles bourgades jusqu’à la fin du XIXe siècle. La construction du chemin de fer entre Mende et La Bastide lui imposa à l’horizon un viaduc de 168 mètres de long, désormais partie intégrante du paysage. De là, le chemin s’affranchit de la vallée pour chevaucher les contreforts de la montagne du Goulet. Autrefois recouvert de lande à genêts, l’immense plateau s’étirant d’est en ouest a fait l’objet d’un reboisement depuis le début du XXe siècle. C’est au terme d’une traversée forestière que je débouche sur les hauteurs des Alpiers, où le Lot trace ses premiers méandres. Une douce transition entre prés et bois accompagne ma descente vers Le Bleymard, où le comptoir de Chez Mario attend les randonneurs assoiffés pour un apéro à l’accent lozérien.
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Le Bleymard > Le Pont-de-Montvert
Causses et les Cévennes, paysage culturel de l'agro-pastoralisme méditerranéen classés Patrimoine Mondial de l'UNESCO, Parc National des Cévennes, classé Réserve Biosphère par l'UNESCO, Mont-Lozère, paysage à Finiels, Le Pont-de-Montvert. © Guy CHRISTIAN / HEMIS
Courte mais intense, l’ascension du mont Lozère, qui culmine au pic du Finiels, à 1 699 mètres, me fait basculer côté Cévennes, dans un paysage pastoral émaillé de gigantesques blocs de granit. En haut, la vue à 360° s’étire des Alpes à la Méditerranée…
Une forme d’excitation mêlée d’appréhension accompagne toujours les prémices d’une journée au sommet. Qu’il s’agisse de celui de la Lozère et de ses « seulement » 1 699 mètres importe peu. On marche vers l’inconnu avec en tête les mises en garde des autochtones sur la brume qui égare les randonneurs imprudents. Laissant derrière moi les dernières maisons du Bleymard, je file vers l’objectif. Au bout d’une heure de grimpette effrénée apparaissent les bâtiments de la station de ski du Mont-Lozère. Après le gîte, étape prisée des marcheurs, suivre les montjoies, ces pierres dressées installées par l’ordre de Malte qui jalonnent le chemin jusqu’à la montée finale. À ceux qui n’auraient pas compris le message, un panneau réitère l’avertissement sur les risques d’égarement en cas de mauvaise visibilité… Le vent est soutenu mais la vue dégagée dissipe mes derniers doutes pour me lancer dans l’ultime kilomètre. La beauté des lieux est saisissante et le panorama est, comme promis, à couper le souffle ! Et si le temps n’est pas assez clair pour apercevoir le mont Blanc, la Méditerranée est bien visible par-delà les courbes des Cévennes. À l’ouest, le causse Méjean annonce l’entrée en pays calcaire…
Le minéral omniprésent
Le GR® 70 - Chemin de Stevenson se jette sur la face sud de la montagne et atterrit, à la faveur d’une clairière, sur une cabane forestière spartiate mais bienvenue pour un repas à l’abri du vent. Encore deux virages à travers bois, on débouche sur les pâturages, immenses étendues d’herbe rase d’où émergent d’énormes blocs de granit adoucis par l’érosion. Le minéral est omniprésent jusqu’au dernier balcon surplombant Le Pont-de-Montvert. Baignés dans la lumière de la fin d’après-midi, deux clochers se faisant face racontent une page majeure de l’histoire de la Lozère. C’est ici que commença le soulèvement des protestants des Cévennes, ou « guerre des Camisards », en 1703.
Le Pont-de-Montvert > Florac
Pont-de-Montvert, point de départ de la guerre des Camisards, vallée du Tarn. © Guy CHRISTIAN / HEMIS
Une mise en jambes dans la fraîcheur de l’ubac, prélude à une longue marche en crête vers Florac. Au pied des falaises calcaires du causse Méjean, la petite sous-préfecture de 2 000 âmes vit au rythme paisible des quatre cours d’eau qui s’y rejoignent.
Ce matin, nous sommes quatre à prendre le départ à seulement quelques minutes d’intervalle. Annaëlle et Léa cheminent en autonomie, installant leur camp au gré de l’humeur du jour et de la générosité des voisins. Christelle – dont c’est la première randonnée itinérante – a choisi la compagnie d’un âne et le confort des gîtes. On papote le temps que les jambes se réveillent, puis chacun prend son rythme, non sans se promettre de se retrouver plus loin pour un pique-nique partagé ou une bière de fin de journée. Après la traversée d’un plateau émaillé de quelques bergeries anciennes, le chemin se glisse dans l’épaisse forêt d’ubac du massif du Bougès. Entre hêtraie et sapinières, le marcheur peut espérer surprendre l’un ou l’autre des cerfs et chevreuils qui logent dans ces bois. Le grand tétras, gallinacé sauvage disparu au XVIIe siècle, a fait l’objet d’une réintroduction dans le secteur, mais son observation n’est réservée qu’aux chanceux.
Au carrefour de la pierre et de l’eau
Du Signal du Bougès, troisième sommet des Cévennes après le mont Lozère et l’Aigoual, le regard s’ouvre soudain vers le sud. Tantôt glabre, tantôt boisée, la ligne de crête s’enfuit vers le couchant, stoppée net par l’immense barre rocheuse du causse Méjean. Là-bas, au confluent du Pêcher, du Tarnon, de la Mimente et du Tarn, la petite ville de Florac joue les points de jonction entre le granit du mont Lozère, le calcaire des causses et le schiste des Cévennes. D’où son surnom de « carrefour de la pierre et de l’eau ». Après trois jours de marche en solitaire, l’arrivée dans l’unique sous-préfecture du département fait l’effet d’un retour à la civilisation. Une tarte à la châtaigne pour me réconforter, et j’entame le tour des ruelles. Alimenté par la source du Pêcher, le réseau de canaux berce au son de l’eau qui coule. En terrasse, les discussions s’animent, comme pour contredire la fraîcheur du soir : crier haut et fort que le printemps est enfin arrivé.
Florac > Cassagnas
Château de Saint-Julien-d'Arpaon © Gil GIUGLIO / HEMIS
Un chemin muletier au milieu des châtaigniers, suivi d’une ancienne voie de chemin de fer au fil de l’eau me permettent de remonter la vallée de la Mimente jusqu’à Cassagnas, berceau des Camisards et point final de mon parcours.
Une légère brume plane au-dessus de la Mimente à l’heure où je me mets en marche. De celles qui attendent les premiers rayons de soleil pour se dissoudre dans l’air. Vite ! Profiter du mordant du petit matin pour gagner quelques mètres de montée. À La Salle-Prunet, bâtisses rénovées et constructions nouvelles sonnent comme un pied de nez à cette démographie lozérienne qu’on dit en berne. Le village derrière moi, voilà que m’enveloppe le vert si particulier des châtaigniers. Cette fois, c’est certain, nous sommes entrés en Cévennes. De part et d’autre du chemin, une myriade de murets de soutènement en plus ou moins bon état rappellent l’époque où l’« arbre à pain » mettait à profit les pentes schisteuses pour produire le fruit qui préserva ce pays des famines. Une fois récoltées, les châtaignes étaient séchées au feu de bois dans les innombrables « clèdes » (cabanes, ndlr) qui essaiment les terrasses. Avant d’être descendues vers la vallée à dos d’homme ou de mule, suivant le chemin dont nous autres randonneurs, profitons encore.
Et vint la machine à vapeur
Lentement mais sûrement, ce dernier nous emmène vers Saint-Julien d’Arpaon, où il rejoint le creux du vallon. De là, le GR® 70 profite de la voie de chemin de fer qui relia jusqu’en 1968 Florac à Sainte-Cécile-d’Andorge. On dépasse l’ancienne gare pour cheminer en rive droite, jouissant à chaque méandre de vues plongeantes sur la rivière. Bercé par le calme de ces ultimes kilomètres, on peine à imaginer les travaux titanesques entrepris à l’aube du XXe siècle pour faire passer la machine à vapeur dans cette vallée du bout du monde. L’appel de l’eau transparente finissant par l’emporter, ma traversée se conclut par un bain… revigorant. Mais peut-être aurait-il été meilleur si j’avais parcouru le Stevenson en juillet. « Rien n’est moins sûr », se serait moquée mon hôtesse du premier soir.
Découpage
Le GR® 70 - Chemin de Stevenson s’étire sur 252 km du Puy-en-Velay, en Haute-Loire, à Alès dans le Gard. Il se compose ici de quatre étapes de 4 h 50 à 8 h 20, de La Bastide- Puylaurent à Cassagnas.
Jour 1 : La Bastide-Puylaurent > Le Bleymard - Difficile / 29,3 km / 8 h 20 / + 950 m // - 900 m / balisage GR®
Jour 2 : Le Bleymard > Le Pont-de-Montvert - Moyen / 19,3 km / 5 h 45 / + 700 m // - 900 m / balisage GR®
Jour 3 : Le Pont-de-Montvert > Florac - Difficile / 28,5 km / 8 h 10 / + 800 m // - 1 100 m / balisage GR®
Jour 4 : Florac > Cassagnas - Moyen / 19,4 km / 4 h 50 / + 450 m // - 220 m / balisage GR®
Conseilsavant de vous lancer
Équipement
Chaussures de randonnée basses ou à tiges montantes avec semelles antidérapantes, bâtons de marche vivement conseillés.
Dans le sac à dos : veste de pluie/coupe- vent, veste polaire, chapeau, lunettes de soleil, crème solaire, pharmacie, lampe de poche, gourde, aliments énergétiques.
Découvrir
- Viaduc de Mirandol, à Chasseradès : difficile de le rater lorsqu’on chemine sur le GR® 70. Construit dans les années 1880 pour faire passer la ligne ferroviaire reliant Mende et La Bastide, l’édifice vaut à ce village de 150 habitants d’avoir sa propre gare toujours desservie par le TER.
- Écomusée du Mont-Lozère, au Pont-de-Montvert - 04 66 45 80 73 : « Porte d’entrée de l’écomusée », la Maison du mont Lozère raconte d’abord l’histoire de ce paysage et de ses habitants à travers une exposition permanente. La visite se poursuit ensuite in situ, au fil d’une dizaine de sentiers de découverte autour du patrimoine naturel et culturel du territoire.
- Château du Parc national des Cévennes, à Florac - 04 66 45 01 14, ville-florac.fr : installée dans les murs du château de Florac, la Maison du Parc national des Cévennes est une mine d’informations pour qui veut visiter le territoire, doublée d’un espace accueillant des expositions thématiques.
- Collégiale de Bédouès : construite à la fin du XIVe siècle pour abriter le tombeau de la famille Grimoard, cet édifice en schiste est l’occasion de se plonger dans l’histoire du pape Urbain V, né en 1310 sous le nom de Guillaume Grimoard au château de Grizac (commune du Pont-de-Montvert).
Infospratiques
Caractéristiques
Dénivelés : les dénivelés et kilométrages importants peuvent être réduits en optant pour des étapes intermédiaires.
Période : l’enneigement rend certains tronçons impraticables en hiver et l’été peut être torride dans les Cévennes avec de violents orages. Quelle que soit la saison, un équipement adapté et le suivi des prévisions météo sont indispensables.
Balisage : blanc et rouge, couleur GR®.
Topoguide : Le Chemin de Stevenson - GR® 70
À savoir
Le GR® 70 traverse des zones pastorales et des terrains privés avec l’aimable accord de leurs propriétaires. Veillez à rester sur le sentier et respectez les troupeaux.
Accès
En voiture, l’A9 jusqu’à Nîmes, puis N106 et D906 jusqu’à La Bastide-Puylaurent.
En train, TGV jusqu’à Nîmes, puis TER, arrêt à La Bastide - Saint-Laurent-les-Bains. www.oui.sncf.fr
Contacts
FFRandonnée : ffrandonnee.fr, 01 44 89 93 93, info@ffrandonnee.fr
FFRandonnée Lozère : lozere@ffrandonnee.fr, lozere.ffrandonnee.fr
Lozère Tourisme : 04 66 65 60 00, lozere-tourisme.com
OT de tourisme Mont Lozère 04 66 46 87 30, destination-montlozere.fr
OT des Cévennes au Mont Lozère 04 66 45 81 94, cevennes-montlozere.com
OT Cévennes-Gorges du Tarn 04 66 45 01 14, cevennes-gorges-du-tarn.com
Association Sur le chemin de Robert Louis Stevenson 04 66 45 86 31, chemin-stevenson.org
Parc national des Cévennes (Florac) 04 66 27 94 94, cevennes-parcnational.fr
Fédération nationale Ânes et randonnée ane-et-rando.com